Les six réunionnais du sextet rock S6X nous proposent un album longtemps attendu, puisque sorti près de six ans après la fin de leur résidence à la Music Halle, école de musique toulousaine réputée. Ayant à maintes reprises foulé les scènes des lieux rock de la ville rose, on attendait toujours que le groupe nous offre un support physique à faire tourner en boucle à la maison. C’est aujourd’hui chose faite avec cet album répondant au doux nom de Vertiges et composé non pas de six mais 16 titres (pas 15, pas 17, non 16 !). Vous l’aurez compris, ce chiffre six leur colle à la peau.
Quand on pense à l’île de La Réunion, on pense au créole, au séga, au maloya. Ne vous y trompez pas, même si les six garçons ne renient absolument pas leurs racines et si l’on sent des références plus ou moins explicites dans leur musique, il s’agit ici de rock pur et dur, à tendance alternative déviant parfois vers le progressif. Voilà des musiciens inspirés, très créatifs notamment dans les harmonies créées par les trois guitaristes de la formation. En témoigne le morceau A.W.M., festival de six cordes aux riffs entremêlés pour un résultat bluffant tout comme dans Au gré du vent. La présence de trois guitares joue également en faveur d’un son puissant, dense, intense qui s’impose dès l’introduction du morceau d‘ouverture Ôtez les masques, A la limite, 19/8 le départ, Vertiges, Contes de faits ou Sang-froid. Créatifs également sont les deux œuvrant à la rythmique, le duo basse-batterie nous gratifiant de quelques déconstructions fort intéressantes parmi la multitude de plans inspirés figurant dans Vertiges.
Ne se cantonnant pas aux morceaux puissants, on pourra écouter des titres plus folk comme L’ogre du songe, Contes d’éternité ou encore le « C:Rock Notes Award » du titre qu’on met plus de temps à lire que ne dure le morceau, j’ai nommé Un grognement sourd indistinct dernier survivant d’une guerre de mots, morceau interlude court mais qui reste comme l’un des plus beaux de l’album. S6X développe également une atmosphère planante sur certains titres par des down-tempo très fins ou des ajouts de reverb délicates comme dans Le pardon ou encore sur la guitare en arrière-plan de Libre et fier.
Côté chant, c’est un grain particulier, une voix joliment éraillée, puissante et très habitée usée sans trop d’artifices, ni de technique à outrance, qui dévoile des lyrics écrits dans la langue de Molière. C’est une chose qui mérite d’être soulignée puisque beaucoup choisissent maintenant la facilité d’écrire en anglais, langue plus chantante de nature.
Vertiges est donc un album efficace, mûri et inspiré même si l’on décèle quelques petites facilités dans des instrumentations (Libre et fier, Lentement) ou des lignes de voix un peu moins imaginatives (A la conquête, Lentement), accrocheuses mais déjà entendues ailleurs. La qualité et la production ont été soignées, à l’image des prestations scéniques du groupe. On aurait éventuellement pu, sur certains morceaux, mettre la basse un peu plus en avant. Elle parait parfois un brin sous-mixée. Un album à écouter plusieurs fois pour en déceler tous les atouts et qui nous offre une presque heure de musique avec ses 16 morceaux. Le groupe n’a décidément été avare ni en qualité, ni en quantité.
A noter que S6X est à mes yeux avant tout un groupe de scène, je ne saurais que trop vous conseiller d’aller les voir en live pour profiter pleinement de leur musique.
[Fanch]
S6X, Vertiges, Noa Musique, 2011.
Album en écoute intégrale sur Deezer.
Tracklist :
01. Ôtez les masques
02. Lentement
03. A la limite
04. Libre et fier
05. Un grognement sourd indistinct dernier survivant d'une guerre de mots
06. A.W.M.
07. Au gré du vent
08. 19/8 le départ
09. Vertiges
10. L'ogre du songe
11. La dévoreuse
12. Le pardon
13. Contes d'éternité
14. Contes de faits
15. Sang-froid
16. A la conquête
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